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J'peux pas, j'ai poney!

    

Le Championnat du monde senior 2024 a rendu son verdict: Marion Lamorinière et Apple du Colombier, princesses esseulées de Belgique !

Manon Lamorinière à Monpazier - 7-09-2024 @Facebook LEWB Endurance
Et si la Belgique a accumulé les mauvais présages durant les 2 semaines de pré-compétition (défections de Louna Schuiten/Sabah du Courtisot et Peter Bastijns/Baltimore), les coups du sort la frapperont (comme ils frapperont bien d'autres royaumes et républiques) jusqu'au bout du bout de ces 160 km démoniaques de Monpazier-en-Dordogne, faits de pluie, d'orages, de boue, de déferrages, de glissades, de chutes, de multiples pleurs (beaucoup) et, heureureusement, d'heureux dénouements aussi (trop peu).
 
Par exemple, à l'image de ce qu'ont vécu nos compatriotes les plus discrètes, Marion Lamorinière et sa jument Apple du Colombier (2013, Arques Perspex x Ras El Hadar), autrices d'une performance parfaitement raisonnée, au terme de laquelle elles se classent 25èmes (119 partants, 45 finisseurs, soit un ratio édifiant de 38% !!!), à une moyenne de 15,09 km/h. Jean qui rit, Jean qui pleure : ayant mené exactement la même course, en total partenariat, Elisabeth Hardy et sa jument Jaka do Inquisidor (2014, Sadepers x Gaucho) se voient éliminées au contrôle final. Cette déception, sonnera comme l'ultime avatar du cauchemar vécu par les Belges après les crucifixions de Clémentine Truffet (Eol Coutillas, boiterie), au contrôle initial ; de Laura Lenges (Oscar, méta), après la 2ème boucle ; de Nicolas Willems (Aida, boiterie), au terme de la 4ème étape ; et de Steve Peignat (Eaunoire Ikam, boiterie), avant le dernier effort.
 
Triste consolation : la plupart des équipes ont connu pareil châtiment. Si parmi les 39 nations représentées, 20 concouraient pour le classement par équipe, dont 15 alignaient le maximum de 5 combinaisons autorisé, au final, il n'y a que 6 nations classées. La France y apparaît magistralement à la première place avec 5 concurrents rentrés sur 5 partis. Tous dans le Top 10 (ou quasi). Chapeau bas pour leur stratégie d'attente, éprouvée depuis plusieurs années, qui est la marque de fabrique hexagonale, déjà productrice d'innombrables médailles, souvent faites, comme ici, d'un métal jaune. Toutes les autres nations ténors ont été décimées : pas de classement d'équipe pour l'Espagne, le Bahrein, les Émirats, l'Italie, le Brésil, l'Australie ou le Portugal. La Suisse, les Pays-Bas et le Royaume-Uni tirent leur épingle du jeu, mais, grosse surprise (pour certains, mais non point aux yeux des observateurs attentifs de la discipline), ce sont la Chine et la Malaisie qui obtiennent, magnifiquement, les médailles d'argent et de bronze. A l'image de la géopolitique mondiale, le centre de gravité de l'endurance se déplace inexorablement à l'est. Le Moyen-Orient hier. L'extrême-Orient aujourd'hui. Encore faudra-t-il confirmation. Remontés avec des chevaux français, espagnols ou portugais, ces (grands) pays asiatiques nécessitent, à ce jour, le support d'entraîneurs européens (tels, parmi d'autres, l'extraordinaire Gaby Ginesta des Écuries du Cavallon), mais gageons que, comme les pays arabes l'ont fait et réussi, ils trouveront rapidement leurs marques et leur indépendance.
 
Ce compte-rendu serait bien entendu scandaleux s'il ne relatait point les exploits individuels, qui ont, notamment, consacré le Cheikh Nasser Al Kalifa, Prince héritier du Royaume du Bahrein, comme indiscutable monarque régnant de l'endurance contemporaine. Après avoir remporté le Mondial Senior 2022 (réalisé en février 2023 à Abou Dhabi), puis le Mondial Jeunes Chevaux 2023 (à Vic, en septembre), Nasser confirme, persiste et signe en allant décrocher l'Or, à du 18,75 km/h de moyenne ! Rien à redire. Excellent cavalier. Grand sportif. Signalons que ses 3 titres ont été acquis via 3 chevaux français, fils de Baltik des Ors (Persik, bien entendu), tel ici, cet Everest la Majorie (hongre, 10 ans, issu d'une mère Derkouch, Khalfa), impressionnant de facilité et de récupération.
L'Argent va aux Émirats grâce à Saeed Al Harbi et Castlebar Cadabra (hongre, 16 ans, Castlebar Optic x Chip Chase Sadaqa), un fils de la fabuleuse jument (décédée), Yamamah. 18.72 kmh de moyenne.
Quant au Bronze, il est pour la France, via Melody Théolissat et Yalla de Jamila (hongre, 10 ans, Djevar des Graves x Piruet), avec une moyenne de 18.33 kmh et, en prime, la vitesse la plus rapide réalisée durant la dernière étape, 21.40 km/h !
 
Outre, les 4 autres représentants hexagonaux (Virginie Atger, Clémentine Chaud, Julien Lafaure, Philippe Tomas), on retrouve des habitués des hauts de classement dans le Top 20, comme la double championne d'Europe, Sabrina Arnold (GER, 6ème avec Easy El Boheira, née chez les Branly, au Courtisot) ; la vice-championne du Monde 2014, Marijke Visser (NED), résidente belge de Stavelot (7ème avec Chaitana des Chaises) ; le champion d'Europe 2021, Angel Soy Coll (ESP), qui se classe 13ème avec Dusty de Bozouls. Fait remarquable et remarqué, la plus jeune athlète de la compétition, la sympathique chinoise Jiahe Sui, 16 ans, finit ... 16ème (avec Eiwa de Bozouls), tandis que son père, Bo Sui, se classe 23ème en compagnie du cheval espagnol Venecia Cid.
 
Et si le Championnat du Monde est terminé, on n'en a point fini avec Monpazier 2024 puisque ces lundi et mardi, quantité de CEI 1, 2 et 3* sont au programme, avec des Belges à l'affiche (quasi tous LEWB). D'ores et déjà, un grand bravo au comité organisateur, orchestré par Jean-Noël Lafaure, aux nombreux bénévoles et officiels. L'occasion est déjà là pour nos compatriotes de travailler en pensant à demain : point de lamentations, mais de l'analyse, de la vision et du travail. A nos étriers !
 
Quant à Marion Lamorinière, la Belgique, et tout particulièrement la LEWB, ne peuvent que se réjouir de l'arrivée, dans notre giron sportif de cette recrue, née Mottoul, de parents belges, il y a 36 ans. Possédant le double passeport franco-belge, Marion a opté en 2023 pour la nationalité sportive belge et s'est affiliée à la Ligue. Résidant en Provence, au Haras de la Masselle, technicienne vétérinaire spécialisée en reproduction équine, elle partage la passion, la profession et le quotidien de l'entraineur, éleveur, cavalier et courtier Stéphane Chazel, incontournable figure internationale de l'endurance. Merci, Marion, pour cette performance de première sélection. Ce n'est qu'un début !

 

Suite des épreuves de Monpazier: Louna Schuiten et Elisabeth Hardy, Top 10 sur 160 km du lundi

La Dordogne aura charrié le froid et le chaud pour Elisabeth Hardy. Éliminée samedi, à l'arrivée des 160 km du Championnat du Monde, l'Amazone aux neuf vies n'aura pas mis 48 heures pour rebondir : au même endroit, sur les mêmes pistes détrempées et boueuses, mais, bien entendu, avec une autre monture (Avalon Imperia, jument, 2013), Elisabeth empoche une 10ème place, à du 16,00 km/h, sur la CEI3* de "rattrapage" mise en place en marge du Mondial, qui a vu la participation de 58 couples (dont 35 classés), parmi lesquels nombre de ténors. Louna Schuiten notamment. Autre personnalité incontournable de l'endurance belgienne, la Bruxelloise délocalisée en Finistère, a vécu de drôles de moments ces dernières semaines : d'abord avec la blessure de Sabah du Courtisot, qui l'a privée d'équipe nationale ; ensuite avec une grosse chute, qui lui coûte une victoire, le week-end dernier sur la 2* de Brandivy. Qu'importe, il s'agit déjà de préhistoire. Aujourd'hui, après tactique commune, mode "brabançonne", elle grapille même une place, dans les derniers hectomètres, à sa compatriote, mais néanmoins adversaire : 9ème, à du 16,10 km/h, en compagnie d'Hissane Kisswani, un hongre de 2009 (NA Figuroso x The Wonder), avec lequel elle signait déjà un Top 10, en juin sur la CEI2*120 km de Fleurines, dont les pistes, marécageuses version Bayou picard, n'avaient rien à envier à celles du présent Périgord type mangrove. Bref, une belle leçon de ténacité, donnée avec maestra, par deux de nos valeurs consacrées. Serrez les dents, sus à la déprime et au défaitisme !
 
Un état d'esprit dont ne s'encombre sûrement pas Rani Lips, une exception d'ado qui prend à revers les propos du paragraphe ci-dessus. A 14 ans et une première saison inter, la jeune cavalière continue son petit bonhomme de réussite en bouclant, à la 59ème position (111 partants, 86 classés), une 3ème CEI1* de 100 km (après Etalle et Jullianges), à du 13,70 km/h de moyenne, en selle sur Goldikova de Luriecq, une jument de 8 ans, par Igor de Palat x Baltik des Ors (double Persik).
Rani devance ainsi deux athlètes expérimentés : Romane Yernaux, 60ème, à du 13,70 également, avec 3A Ushuayak ; et Peter Bastijns (seul non-LEWB de notre délégation nationale en Dordogne), 78ème, à du 12,60, avec une jeune jument de 7 ans, pour la 1ère fois sur la distance, Natur Urfa.
 
Le lendemain, mardi 10 septembre, ce véritable festival de l'endurance continuait pour le plus grand bonheur des athlètes, des aficionados et d'un abondant public, souvent néophyte mais enthousiaste. Place aux CEI2* de 120 km. Et sans attendre leur dénouement (et d'ailleurs sans Belge au programme), au niveau organisationnel, sportif, vétérinaire et populaire, on peut déjà conclure à une totale réussite. Vive Monpazier. Vive l'endurance !